Partie 4 Enfer à domicile
Retour sommaire Enfer à domicile
***
Nara s'attabla à la petite table du café où l'attendait Gu Na.
Son amie la regarda avec inquiétude:
-Il t'a mise à la porte ? Il n'a plus peur des vidéos?
-Je les ai détruites.
-Tu es folle? Pourquoi as-tu fait ça?
-Je pense que je n'ai plus envie de m'acharner.
-Plus envie de t'acharner? Tu lui a fait de petites misères sur ... quoi? Deux mois? Il t'a torturé une année entière!
-Scolaire, pas civile.
-Ça change tout ! Ce type est un monstre! C'était bien la moindre des choses qu'il paie pour ce qu'il t'a fait !
-C'est vrai. Mais je suis la victime et j'ai fixé le prix.
-Et qu'est-ce que tu vas faire maintenant?
-Disparaître de sa vie. Et l'oublier.
***
Hu Jun Ji décocha un sourire éclatant à son public fou de bonheur en emportant sur son épaule l'énorme pinata lapin rose bonbon qu'il venait de gagner à une pêche aux canards.
Une fille lui agrippa la main lorsqu'il frôla le public pour regagner sa loge mais il n'y fit pas attention.
La chasser était une très mauvaise idée. Elle l'avait vu en situation de faiblesse. Et si elle vendait l'info à la presse? Lui, trompé voire plaqué par Ji Hara, sa côte chutait dans les abysses .
-Si vous êtes plaqué ou trompé, cela signifie qu'il y a mieux que vous et que donc, vous ne valez pas la peine qu'on s'attarde sur vous. Voilà pourquoi vous devez veiller à ne jamais entretenir de passion amoureuse. Aucune ne vaut votre carrière.
Les mots de son professeur de théâtre résonnaient encore en lui tant d'années plus tard...
-Et si on trouve une relation qui la vaut?
-Une carrière peut durer des années, cinq, dix... parfois même vingt ou trente ans... Aucune femme ne vous gardera aussi longtemps.
Hu Jun Ji se sentait mal sans savoir pourquoi.
-Sans savoir pourquoi? Tu plaisantes? Ta petite amie te trompe avec ton meilleur ami!
-Elle va me vendre à la presse.
-Elle l'aurait fait. Un an de harcèlement claque plus qu'une vague tromperie en première page.
-Une rupture avec Jia Hara ? En exclu, ça vaut une fortune... De quoi lui payer un château...
-Alors pourquoi l'avoir mis dehors, abruti? Femme bafouée égale femme prête à trahir...
Jun Ji accéléra: Il savait très bien pourquoi il l'avait mise à la porte. Il n'avait pas supporté la lueur de pitié dans ses yeux.
-De la pitié? Pour moi? Dans les yeux de cette mocheté? fauchée et stupide?
Jun Ji entra dans la loge et se dirigea vers le miroir:
-Elle t'a bien pourri la vie pendant deux mois, bon débarras...
A ce moment, son regard tomba sur la coiffeuse et il sentit une grande colère l'envahir.
***
Nara embrassa Gu Na :
-Tu es sûre que ça va aller ? demanda cette dernière.
-Evidemment!
-Il fait un froid polaire, ce soir et on a annoncé une tempête orageuse. Si tu n'as pas d'abri...
-Tout va bien. Ne t'inquiète pas.
Gu Na l'embrassa à la hâte:
-Bon, je dois rentrer, Ku Ji revient du judo dans vingt minutes et je dois préparer le repas du soir. A plus !
Nara la regarda disparaître dans la nuit et releva son col. le plus dur commençait.
***
Ku Fu Jin était sans domicile fixe depuis des années. Vivre sous ce pont était son quotidien. Cette nuit s'annonçait difficile. Très difficile. Heureusement qu'il avait une tente.
***
-Flash Info spécial: Nous interrompons nos programmes pour annoncer une tempête orageuse d'une rare violence sur Séoul cette nuit. La température descendra à -8°C tandis que de violentes chutes de neige devraient rendre la circulation difficile . Surtout, restez chez vous si cela est possible.
***
Nara s'arrêta pour respirer : elle était épuisée, glacée.
La jeune fille sourit:
-Tu n'auras pas eu la vie d'une héroïne de Drama mais tu vas mourir comme elle... La surgélation, on n'a pas trouvé mieux depuis Hana Yori Dango.
Nara secoua la tête pour retrouver des idées claires, sans succès.
Elle avait l'impression que son buste était fait de glace.
-Et en général, c'est au moment où elle va perdre connaissance que le héros arrive sur son cheval blanc...
Elle se laissa tomber à genoux près d'un mur de pierre.
-Ne sois pas idiote : les princes charmants ne sont que dans les contes de bonne femme... Peu importe... Maintenant, c'est la fin.
Elle ne sentait plus son corps. Une barre de glace serrait son front.
-Est-ce que c'est vrai qu'on retrouve tous ceux que l'on aime dans l'autre monde?
Tout était flou. Les bruits de la rue environnante étaient à présent inaudibles.
Nara leva la tête: recroquevillée comme ça, elle avait tout d'une héroïne de dramas ; Sauf qu'elle, on ne la sauverait pas.
Elle n'aurait pas droit au gentil prince qui vous soulève avec douceur pour vous réchauffer dans son manteau de cachemire.
Une poigne rude la tira brusquement par l'avant-bras:
-Lève-toi, mocheté! Pas possible d'être bête à ce point!
A travers le brouillard de son inconscience, Nara reconnut son sauveur.
-Je continue à délirer... Bonjour Hu Jun Ji.... N'importe quoi!
Son miséricordieux héros la tenait contre lui et Nara se laissa aller, la joue collée au blouson de cuir..
-Kyu Gu ssi, vous êtes venu me sauver...
***
Hu Fun Ji regardait sans le voir; le reflet d'un homme fou de colère dans le miroir de la loge qui lui faisait face. Dans sa main, il serrait la carte de crédit avec une telle force que ses phalanges se montraient douloureuse.
-Mais quel est son problème? Je lui ai dit de partir, pas d'aller crever de froid sans un sou dans un coin? Elle a squatté mon appartement sans vergogne pendant deux mois mais elle n'est même pas fichue de profiter de mon compte en banque une seconde de plus ?
Des cataractes d'eau glacée se déversaient sur les vitres, les faisant trembler avec fureur.
Hu Jun Ji ferma les yeux:
-Bon. Elle a fait son choix. Tu n'as rien à voir là-dedans.
-Ils ont dit qu'il ferait -8°C.
-Et alors? Et elle a bien dû trouver quelqu'un pour l'héberger...
-Apparu miraculeusement depuis deux mois?
-Qu'est-ce que cela peut te faire? Elle te pourrit la vie depuis toujours!
-Ce n'était pas volontaire au début...
-Elle s'est bien rattrapée depuis...Tu vas rentrer tranquillement à la maison et oublier....
-Elle va mourir par ta faute! On verra si tu peux vivre avec ça!
-Je ne sais même pas où elle est...
-Et alors?
Il avait roulé toute la nuit. Hatori ne savait bien sûr pas où elle était... C'était bien la peine de jouer les complices lorsqu'il s'agissait de lui monter un mauvais plan. Il avait eu l'air très étonné de le voir sauter dans sa voiture :
-Vous allez partir à sa recherche?
-Si on ne la retrouve pas, elle va mourir. Tu vois une autre solution ?
-J'ignorais que monsieur...
Quoi ? Pouvait se soucier d'autre chose que de sa petite personne ? Crétin ...
Il avait fait chaque rue, chaque terrain vague, chaque friche industrielle, chaque parc public, en vain.
-Si elle meurt, ce sera de ta faute. C'est toi qui l'a mise dehors.
-Je pouvais pas deviner que cette idiote allait renoncer à sa carte de crédit !
- Et elle ne pouvait pas deviner que tu allais te suicider! Alors ce n'est plus à elle qu'il faut en vouloir...
Les yeux sur la route inondée, Hu Fun Ji avait manqué pilé devant cette révélation.
Il lui en voulait à mort.
-Evidemment, que tu lui en veux à mort! Elle a détruit ton appartement...!
-Elle ne voulait pas te tuer. C'était une simple plaisanterie à ses yeux.
-Elle voulait te détruire.
-Elle voulait se venger avec une blague de potache. Jia Hara et Gun auraient voulu te tuer.
-Elle a voulu me tuer et elle m'a abandonné.
-Elle n'a pas voulu te tuer et tu l'as mise dehors. Elle aurait pu te détruire, elle ne l'a pas fait, ce qui fait d'elle la seule personne qui t'ait jamais protégé. Et elle va mourir par ta faute...
Hu Jun Ji appuya sur le champignon. La voiture manqua partir en aquaplanning mais il n'y prit pas garde.
Elle avait essayé de le protéger : que ce soit par son silence puis ses attentions agaçantes répétées...
-Vous voulez du thé chaud? Vous allez prendre votre cachet immédiatement! Arrêtez-vous que je prenne votre tension...
-Ça suffit! Elle a fait ça parce qu'elle se sentait coupable de t'avoir presque assassiné !
-Et comment vas-tu te sentir quand elle sera morte de froid par ta faute ?
Hu Jun Ji ne cessait de quadriller le quartier avec l'énergie du désespoir, la poitrine douloureuse.
-Tiens bon, Pyon, j'arrive.
A ce moment, le téléphone avait sonné et Hu Jun Ji était passé en mains libres:
-Bonsoir... Je m'appelle Ku Fu Jin, je vis sous le pont Gu Ju au bord de la rivière Han... Je viens de trouver ce téléphone dans la poche d'une jeune fille inconsciente et votre numéro était enregistré... Les secours ne répondent pas? Pourriez-vous venir la récupérer?
***
Nara se sentait bizarrement bien, au chaud, bercée par le balancement de l'homme qui la potait sur son dos...
Elle aurait dpu se soucier de savoir qui la portait mais elle ne pouvait pas réfléchir... Et pourtant, si c'était oppa Gu... Ce ne serait guère étonnant... Il avait toujours été là pour elle...
Non il ne portait jamais de cuir...
Son père la portait souvent comme ça... mais ce ne pouvait pas être lui....
Ses pensées étaient confuses... Elle sentit vaguement qu'on la déposait sur le siège d'une voiture.
-C'est peut-être un assassin, pensa t-elle, l'esprit cotonneux... Au moins, je vais finir dans le coffre d'une voiture de luxe...
Arrivée dans un garage... Montée des escaliers... On la déposait dans un lit...
***
Une lumière crue. Il faisait grand jour.
Elle était revenu à l'appartement. Assis sur une chaise près d'elle, Hu Jun Ji la regardait méchamment:
-Bravo! Tu voulais te suicider ou quoi?
-Hu Jun Ji? C'est toi qui m'a ramené ici?
-Non, Mickey Mouse! Qui veux-tu que ce soit...?
-Mickey mouse serait moins bizarre?
-Mais qu'est-ce que vous avez tous à me prendre pour un monstre?
-On se demande, monsieur, déclara solennellement Hatori en ramassant une tasse sur la table de chevet.
-Je ne vous paie pas pour vous répandre en commentaires.
Nara secoua la tête:
-Ça fait longtemps que je dors?
-Hier soir. Heureusement que tu as eu la bonne idée de disparaître la veille de mon jour de repos!
-Sinon, tu ne m'aurais pas sauvé? demanda malicieusement la jeune fille.
-Monsieur est un héros mais il n'est pas fou, murmura Hatori à l'oreille de Nara.
-Pourquoi tu as fait ça?
Hu Jun Ji la regardait curieusement.
-Fais quoi?
-Pourquoi tu as laissé ta carte de crédit?
-Elle me servait à recevoir mon salaire de secrétaire mais puisque tu m'avais renvoyée...
-Qui se soucie de ce détail, idiote? Tu as manqué mourir!
-Et après? Le jour où tu as manqué me noyer , c'était pas mieux.
-J'ai pas à me justifier devant une pauvre fille comme toi...
-Alors qu'une fille comme Jia Hara...
-Arrête avec ça, tu veux?
-Pourquoi, tu l'aimes toujours?
-Je ne fonctionne pas en mode on/off. Je suis un peu plus complexe que ça.
Nara fit mine de se lever:
-Bon... Merci de m'avoir sauvée...
-Où tu vas? !!!
-Je pars. Tu m'as sauvée, je peux reprendre ma route.
-Ta route passe par la rivière Han en crue ? Tu restes ici.
-Je ne veux rien te devoir!
-Tu me dois la vie. Je crois que ma carte bleue, à côté...
-Je ne veux rien te devoir.
Hu Jun Ji réfléchit:
-Alors, je ne vois qu'une solution.
-Laquelle? Il n'est pas question que tu te refasses une réputation de chic type sur mon dos.
-Reviens travailler comme secrétaire et fais bien ton boulot. Si tu en es capable...
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